mercredi 21 janvier 2009

Investissements espagnols: L’effet Zapatero

articles de l'économiste

· Croissance fulgurante dès 2004· Les rencontres commerciales hispano-marocaines se multiplient· Aide financière: 557 millions d’euros sur trois ans

LES entrepreneurs espagnols installés au Maroc jubilent. Et pour cause! Les relations économiques et commerciales entre le Maroc et l’Espagne «ont évolué très positivement depuis quelques années». C’est ce qu’ont déclaré des patrons lors d’une rencontre avec des journalistes espagnols à la Chambre de commerce espagnole à Casablanca. Selon de tous derniers chiffres officiels, cette amélioration des affaires est particulièrement due à l’arrivée de José Luis Rodriguez Zapatero au pouvoir en 2004. Ce lien de cause à effet paraît justifié. En effet, les investisseurs espagnols reconnaissent l’influence des différents gouvernements dans l’entente entre les deux pays. Certains d’entre eux pensent que la participation de l’Espagne à la guerre d’Irak a refroidi les relations commerciales alors que du côté marocain, on pense qu’il s’agirait davantage de la crise de l’île Leïla en 2002, période de gouvernance d’Aznar. Il est vrai que quelle qu’en soit la raison, cette année là n’a pas été très fructueuse. D’après les chiffres de l’Office des changes, les investissements espagnols se montaient alors seulement à 389 millions de dirhams. En 2006, ils grimpaient à 7,4 milliards de dirhams. En 2004, soit un an après l’élection du nouveau Premier ministre, le Maroc était déjà le onzième client de l’Espagne, absorbait 1,4% d’exportations totales espagnoles et 5,3% de la totalité des investissements ibériques destinés aux pays étrangers. D’autres chiffres viennent confirmer cette thèse. Le commerce bilatéral a atteint les 5 millions d’euros en 2006, soit plus de 55 millions de dirhams et les ventes au Maroc ont augmenté de 40%. Durant cette même année, l’Institut de commerce extérieur espagnol (ICEX) a déboursé 0,63 million d’euros, soit plus de 6 millions de dirhams pour sa promotion commerciale.

Cette année, l’enveloppe est de 1,5 million d’euros. Actuellement, l’Espagne est le second investisseur étranger au Maroc, juste après la France, avec pas moins de 600 entreprises tous secteurs et tailles confondus. Selon le ministère de l’Industrie et du Commerce espagnol, ces entreprises se divisent en deux groupes: un premier versé dans le commerce avec des intérêts dans le tourisme, l’énergie, l’agriculture et les télécommunications. Mais aussi la construction et l’agroalimentaire. Le second groupe inclut les entreprises qui investissent financièrement dans l’infrastructure, le tourisme, les services publics (tels que l’eau et l’électricité), l’énergie renouvelable, le transport et la pêche. D’après un rapport de l’ambassade d’Espagne, le Maroc est le pays d’Afrique qui a le plus capté d’investissements espagnols, considérant les nombreux projets dans les télécommunications, l’industrie du tabac, le tourisme et l’immobilier. Telefonica, Altadis, Fadesa, Alsa et Tecmed font en effet partie de ces groupes qui ont poussé leurs pions au Maroc. Selon l’Office des changes, le tourisme, l’immobilier et l’industrie marocaine sont les secteurs de prédilection des Espagnols avec une explosion des investissements de 354% entre 2004 et 2005 pour l’industrie. En 2002, les investissements dans le secteur industriel ne dépassaient pas les 7 millions de dollars, soit environ 54 millions de dirhams. En 2005 ils caracolaient à près de 80 millions de dollars! Encore une ascension fulgurante! Cette année-là, l’investissement total des Espagnols avait franchi la barre des 1,5 milliard de dirhams, un chiffre qui a triplé depuis 2004 où on comptabilisait 485 millions de dirhams. Beaucoup d’Espagnols, qui n’osaient pas investir en pays arabes, se précipitent aujourd’hui sur le marché marocain ou renforcent leur présence. Serait-ce une ruée vers l’or ? Dans le secteur bancaire, les grands établissements espagnols reconnaissent qu’ils ont particulièrement intérêt à s’agrandir au Maroc. La Caixa, déjà représentée, pense investir encore plus que son concurrent Santander dont l’intention serait d’augmenter sa participation dans Attijariwafa bank, déjà de 14,55%. Selon José Manuel Reyero, conseiller commercial et économique d’Espagne au Maroc, le Royaume est le huitième client de la péninsule ibérique et le troisième hors Union européenne. «Les relations économiques ne peuvent être meilleures. Il y a chaque jour un peu plus d’entrepreneurs espagnols qui s’intéressent à l’évolution de l’économie marocaine, c’est un climat d’affaires propice que nous espérons avoir avec d’autres pays».

Cet engouement est doublement partagé par les entreprises marocaines qui ont également décidé de s’exporter et plus concrètement en Espagne. L’implantation de la chaîne de vêtements marocaine Marwa illustre parfaitement cette tendance (cf. www.leconomiste.com; édition du 4 novembre 2007). Il faut dire que les rencontres et les activités hispano-marocaines se multiplient ces derniers temps. En octobre, le salon de l’immobilier dans le nord du Maroc avait mobilisé beaucoup d’entrepreneurs et investisseurs espagnols (cf. www.leconomiste.com; édition du 31 octobre 2007). D’ailleurs, dans ce même secteur, Fadesa vient de vendre au groupe marocain Addoha 50% de sa filiale marocaine pour 1,3 milliard de dirhams. L’appui du Maroc au forum méditerranéen du processus de Barcelone et au salon international de la logistique de la même ville avait également permis des rencontres d’entreprises des différents pays méditerranéens. Une autre rencontre de ce type entre le Maroc et l’Espagne est d’ailleurs prévue en 2008.

Dette: 385 millions de DH à convertir
UN plan intégral de développement du marché marocain est en cours d’application pour la période 2007-2009. Ce plan porte sur 567,4 millions d’euros (soit environ 6,5 milliards de dirhams). Un fonds d’aide au développement (FAD) a été enclenché avec à la clé plus de 150 millions d’euros en crédits mixtes. Un fonds d’étude de viabilité (FEV) sur la même période est doté de 3 millions d’euros. Cette ligne de financement est un instrument de politique commerciale qui a pour but l’internationalisation de l’entreprise espagnole, grâce à l’introduction d’ingénieries et de technologies dans les phases de préparation des projets dans un secteur d’un pays du tiers-monde. Pour la conversion de la dette en investissements et publics, un montant de 34 millions d’euros (385 millions de dirhams) est prévu entre 2007 et 2009. Ces aides ne sont pas «gratuites», elles permettent de faciliter aux Espagnols, l’accès à l’information du marché marocain, spécialement sur les nouvelles technologies. Mais également de former des professionnels en commerce extérieur, qui pourront facilement s’intégrer aux entreprises de manière à renforcer le processus d’internationalisation du Maroc. D’autres moyens non financiers sont aussi mis en œuvre pour promouvoir le commerce et l’image des entreprises espagnoles au Maroc (voir tableau). Une enveloppe de 3,9 millions d’euros est mobilisée entre 2007 et 2009. L’élimination des obstacles pour l’accès au marché marocain est également enclenchée grâce à l’amélioration de la sécurité juridique et économique ainsi que par la reconnaissance d’accords qui certifient la conformité des règlements marocain et espagnol. Des accords de formations bilatérales devraient voir le jour d’ici le début de l’année prochaine à travers le programme de Captation et de Formation des professionnels étrangers (POPEX). Enfin, en plus de l’implantation d’une plateforme informatique cette année, la publication d’un guide des affaires du Maroc est en cours de réalisation. Il est prévu des portails d’informations sur l’Espagne en français et en arabe afin de faciliter la communication entre le Royaume et la péninsule ibérique.

Vanessa PELLEGRIN

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